Oct 012005
 

Quand avez-vous ouvert un ouvrage de philosophie pour la dernière fois ? Moi, c’était en terminale. J’aimais ces confrontations d’idées plus pour la forme, la joute que le fond. A 45 ans, avec l’expérience de la vie, les lignes font sens, et cet ouvrage sur Paul Ricoeur égaré sur une étagère de la bibliothèque Couronnes tombait à point nommé.
Paul Ricoeur. Son nom me disait quelque chose. Philosophe, protestant, engagé dans le siècle qui vient de s’achever. Sa pensée rien du tout. Honte à moi. Et pourtant, beaucoup s’accordent à dire que le 20 mai dernier alors qu’il s’éteignait à l’âge de 92 ans, nous avons perdu là l’un de nos plus grands philosophes.
Je ne lirais peut-être de lui que des digests comme celui que lui consacre Olivier Abel(*). La philosophie a ses références, une densité particulière et un vocabulaire qui dissuadent le néophyte ; l’aborder nécessite un investissement difficile à concilier avec le siècle. Et pourtant il ressort de cet ouvrage qui synthétise plus de cinquante années d’intense publication une pertinence singulière. Sans doute parce qu’il me parle de préoccupations fondamentales qui ont été motrices dans mon changement de cap.
Son oeuvre traite de morale et d’éthique thèmes que, depuis les Grecs, il faut à chaque époque cruelle (et là notre l’est) remettre en débat. Qu’est-ce que le bien, quelle place pour l’autre, quel est le sens de la justice, ses textes livrent autant de clefs pour non seulement interpréter le monde mais aussi fonder une action. Sa réflexion d’homme engagé frotté aux totalitarismes, au poids de l’économique dégage une pensée originale. J’aime tout particulièrement cet extrait qui rappelle qu’il n’y a pas de degré apparent dans le bon.

« La charité n’est pas forcément là où elle s’exhibe ; elle est cachée aussi dans l’humble service abstrait des Postes, de la Sécurité sociale ; elle est bien souvent le sens caché du social. »



(*) La promesse et la règle, Le bien commun, Edition Michalon.
Pour connaître l’homme et l’oeuvre consultez l’article Paul Ricoeur édité par l’association pour la diffusion de la pensée française sous l’égide du ministère des Affaires étrangères et le dossier de France Culture.