Juil 072007
 

Lovina, Temple (c) Yves Traynard 2007Jour férié. Kuningan c’est la fin de Galungan le retour des esprits au paradis. Offrande de riz jaune, processions au temple en tenue traditionnelle. 7/7/7. Par la magie du chiffre sept c’est aussi un jour chargé de superstitions dans toutes les religions de l’Indonésie fait remarquer le Jakarta Times. Ici comme ailleurs dans le monde on marie à tour de bras ce samedi sept juillet 2007.
C’est aussi – et ce n’est pas un hasard – le jour choisi pour proclamer les résultats d’un «concours» pour élire les sept nouvelles merveilles du monde ouvert il y a plusieurs années par un site internet(*). Puisque des antiques merveilles il n’en reste qu’une debout (les Pyramides), il fallait en sélectionner de nouvelles. Je m’étonnais de la fortune posthume des sept merveilles originales particulièrement ethno-centrées et datées. Bien que rares soient ceux d’entre nous capables de les citer toutes je me disais qu’il s’agissait de la reconnaissance d’un patrimoine architectural par les Anciens, une célébration du génie humain lorsqu’il est capable du meilleur, quoiqu’à bien y regarder, je n’aurais guère voulu être un ouvrier de ces travaux pharaoniques.
De là à se lancer dans une actualisation de la liste, quelle imbécillité ! D’abord le résultat de ce concours est forcément navrant, puisque ne reposant sur aucun critère (importance historique, esthétique, état de conservation, superficie, représentativité stylistique ou géographique…) L’Afrique Noire – certes pas grande méritante en matière d’architecture ; mais Tombouctou, Djenné, Grand Zimbabwé, Ilha de Mozambique, Zanzibar… tout de même – est totalement absente du palmarès tout comme des sites comme Angkor ou Sainte-Sophie. Surtout cela montre l’imbécillité d’un tel procédé purement commercial. Il ne s’agit pas d’un sondage (il n’y a pas échantillon représentatif), ni d’un vote mondial (frappé d’une abstention massive puisque tout le monde n’avait pas les moyens de voter alors que d’autres s’exprimaient plusieurs fois). Il s’agit ni plus ni moins d’une sorte de lobbying qui tait son nom. Il ne faudrait pas confondre ce type d’utilisation des NTIC (internet, téléphone mobile) et démocratie mondiale. Il est forcément injuste aux peuples qui se trouvent du mauvais côté de la fracture numérique. D’autre part cette publicité faite à sept sites mondiaux ne fait que renforcer, leur attrait et n’est nullement un appel à en découvrir d’autres. On imagine la déception pour les exclus de ce classement sans légitimité qui sera pourtant relayé sans fin par la presse, les guides, les tour-opérateurs… qui s’en serviront de label (visitez la 3e merveille du monde 2007 !)
Enfin, plus grave encore. Comme toute action aujourd’hui doit être associée à un bon geste, l’argent récolté par le concours alimente un fond pour reconstruire les Bouddhas de Bamyan détruits en 2001 si ma mémoire est exacte, par les Talibans. Franchement, y-a-t-il vraiment urgence à faire de l’ingérence culturelle alors que l’Afghanistan n’est pas pacifiée et que d’autres sites à travers le monde se meurent ? Protéger ce qu’il reste des bouddhas, oui bien sûr, lancer un vaste chantier de reconstruction, sans l’avis des Afghans, c’est vraiment jeter de l’huile sur le feu.
Heureux que l’UNESCO se soit dissociée de cette initiative stupide, elle qui lutte pour élargir la liste du patrimoine mondial et non la restreindre, qui mène un combat sans fin pour protéger, rénover… avec les pauvres moyens que l’on sait.


(*) le site des sept (nouvelles) merveilles du monde
(**) le site UNESCO du patrimoine mondial