Sep 042006
 
Ilha de Mozambique, palais Sâo Paulo (c) Yves Traynard 2006La ville dont j’entreprends l’exploration plus systématique aujourd’hui a conservé tous les attributs d’une capitale coloniale du 19e s. Le coquet palais São Paulo, murs vermeils rehaussés de blanc, servit de résidence au gouverneur général de 1763 à 1898. Cet ancien collège jésuite du XVIIe s. demeure le symbole du pouvoir portugais sur le Mozambique.
Du patio, on accède à l’étage par un escalier monumental décoré de quatre statues de bronze dont on trouve d’autres exemplaires dispersés dans la ville(*). Ilha de Mozambique, palais Sâo Paulo (c) Yves Traynard 2006Un jeune page et une Vénus (?) brandissent chacun un lampadaire. Le temps ne semble pas avoir prise sur leur détermination à porter la lumière au monde.
Dans les nombreuses salles du palais transformé en un agréable musée(**) on peut admirer – pied nu pour ne pas abîmer tapis et planchers – un mobilier asiatique extrêmement ouvragé et une collection de vases chinois et de tapis d’Orient. Pour meubler Ilha on passait plus volontiers commande à Canton et Ispahan qu’à Sèvres et aux Gobelins ! Seule exception peut-être le grille-pain électrique NEC de la cuisine assez anachronique puisqu’il doit remonter à la toute fin de la colonisation. Peut-être a-t-il servi à préparer les toasts de Samora Machel seul président à loger un jour au Palais.

L’étage supérieur donnait directement sur la nef de la chapelle par deux fenêtres. Sans doute un legs des Jésuites. Ilha de Mozambique, chapelle du palais São Paulo (c) Yves Traynard 2006Dans cette église désaffectée on a laissé en place une chaire et un retable. Le décor de la chaire est étonnant. Le registre inférieur, sous un cortège de saints, alterne gentils angelots joufflus et terrifiants dragons asiatiques. Le retable doré semble bien discret pour du baroque. C’est que son décor a été déposé pour partie dans le petit musée d’art sacré derrière le palais. Une sainte Anne aux yeux clairs se lamente sur un Christ d’ivoire rehaussé d’or de facture goanaise.
Parmi tous ces saints pas même une de ces vierges noires que l’on porte en procession dans mon Auvergne. Que des Blancs conquérants et esclavagistes ce qui n’empêche pas Vasco de Gama de passer pour un prophète ici. Ilha de Mozambique, Statue de Vasco de Gama (c) Yves Traynard 2006Sa statue sur la place du palais est l’une des rares à ne pas avoir été déboulonnée à l’indépendance. Mieux, une grande croix commémorative près de l’église Santo Antonio du quartier Makuti porte la mention « 1498-1998 Jesus Christ Yesterday Today and Forever ». Curieuse contradiction à mon esprit sans doute trop cartésien.


(*) Chambre municipale et Place Vasco de Gama devant le palais.
(**) Musées du palais Sâo Paulo. 100 MTn. Tlj 9h-16h30. Même billet pour le Musée des Arts décoratifs, le Musée de la Marine et le Musée d’art sacré. Photos interdites.


Pour citer cet article (format MLA) : Traynard, Yves. « Vasco le Prophète ». ytraynard.fr 2024 [En ligne]. Page consultée en 2024. <https://www.ytraynard.fr/2006/09/vasco-le-prophete/>

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