Juin 132006
 

Très mauvaise nouvelle. E noque le coordinateur de notre projet de micro-crédit, responsable mozambicain de la structure, mon collègue au quotidien, a été attaqué par balle en rentrant du bureau hier soir alors qu’il montait dans sa voiture en centre-ville. Il est à l’hôpital central de Maputo dans un état grave. La balle a pu être retirée de l’intestin où elle s’était logée. Après un séjour en réanimation ses jours ne semblent plus en danger. Vol crapuleux ou règlement de compte ? Le mobile de cette attaque ne semble pas très clair. Certes les vols à main armée sont fréquents à Maputo contre des automobilistes. Mais dans notre cas ce qui intrigue c’est que la voiture n’a pas été volée. Le projet de viabilisation de micro-crédit ne semble pas faire que des heureux. Mais on n’ose pas imaginer que certains iraient jusqu’à tuer pour maintenir leurs privilèges même si l’extrême pauvreté aidant, les services d’un tueur à gage ne coûtent hélas pas grand chose à Maputo et les cas ne sont pas rares de règlement de compte mafieux dans le commerce. Il nous faut enquêter car s’il s’agit d’intimidation ce sont tous les membres de l’organisation qui sont en danger. Pour l’investigation, il semble ne pas trop falloir compter sur la police peu nombreuse et sous pression.
Nous avons passé une partie de la journée à l’hôpital à accompagner son épouse. Tout le monde est très digne. Pas de cri, pas de larmes, peu de paroles. Aux urgences, des Toyota déchargent de leur plateau des corps tétanisés, geignants ou évanouis… ballet lugubre. Les Mozambicains semblent résignés. Pas un mot de révolte contre le crime. Est-ce le résultat de la colonisation et de 15 années de guerre civile ? Un tutoiement avec la mort ; une forme de résilience particulière ou un trait culturel ancien ? Il n’est pas temps de philosopher sur ce sujet mais bien plutôt de souhaiter un prompt rétablissement à E noque qui va nous manquer les prochaines semaines. Hier soir fier de mes quelques mots de portugais et le voyant travailler tard je lui avais dit en partant : tu es um homem trabalhador (*). Il avait ajouté avec un humour prémonitoire um trabalhador sacrificado ! Souhaitons que le sacrifice soit de courte durée.



(*) Toi, tu es un homme travailleur