Juil 102009
 
Pudong, le centre d’affaires de Shanghai, constituerait un excellent exercice d’emploi du superlatif pour mes étudiants. On y trouve quelques-unes des plus hautes tours du monde, l’hôtel le plus haut perché, le plus grand mall de la ville… il y a là une recherche de l’exploit, un goût de la compétition, du dépassement technique, propre aux peuples entreprenants qui cherchent la reconnaissance, un mouvement qu’on associe plus volontiers dans d’autres cultures à la vaine prétention qu’au dépassement de soi ou à l’exploit… à moins que cette raillerie ne soit que jalousie mal assumée(*).
Shanghai, Pudong (c) Yves Traynard 2009

Ce goût chinois décomplexé pour le Guiness Book va même jusqu’à homologuer la statue en bois de santal du temple des lamas à Pékin (avec plaque commémorative). L’inscription d’un site à l’Unesco est également très largement relayée, non sans arrière-pensées commerciales du reste.

La fière Pudong, de l’autre côté de l’épaisse Huangpu, offre une vue plus généreuse que le Bund inaccessible pour cause de travaux. Une revanche de la Chine contemporaine sur les Concessions qu’elle regarde désormais de haut, au propre comme au figuré. Un Balzac chinois placerait plus volontiers son Rastignac à l’observatory deck du World Financial Center qu’au bar du vieil hôtel Cathay pour prononcer un définitif « À nous deux maintenant ! ».

La vue sur le Bund au petit matin est plutôt rafraîchissante, mais j’avoue que je m’attendais à un quai, plus étendu, à quelque chose de plus grand. Perfidie de l’imagination. Ce n’est pas New-York même si certains immeubles présentent quelques ressemblances. L’ensemble remonte aux années 30, un style néo classique où triomphe la colonne. Fabuleux destin du chapiteau corinthien qui reste à écrire. A Baoding, l’immeuble tout neuf du centre d’échange international fait lui aussi un large emploi de la feuille d’acanthes.

Shanghai, Pudong (c) Yves Traynard 2009

Côté Pudong, si on laisse de côté la Pearl Tower, un modèle qu’on retrouve dans pas mal de ville à travers le monde, c’est la Tour Jinmao, qui reste la plus élégante à mon goût. Elle rappelle les sublimes tours jumelles de Kuala Lumpur. Mais à distance, le « décapsuleur » géant du SWFC qui vient de la dépasser pris dans un nuage de brume a plus d’allure encore. Le match n’est pas terminé, Pudong n’est qu’un chantier immense et la concurrence risque d’être rude.


(*) Parmi les superlatifs Shanghai possède aussi la plus ridicule des attractions. Le Sighseeing Tunnel, qui relie le Bund à Pudong, un petit train souterrain censé être mirifique et qui arrache tout juste un sourire aux enfants jusqu’à l’âge de trois ans. Au-delà, faites plaisir à vos bambins et à votre porte-monnaie, prenez le métro !