Jan 172007
 

Eloge de quelques pérégrins. […] le retour en Europe est le moment le plus périlleux du voyage. D’abord parce que chez nous la frugalité pauvre est moins tolérée qu’en Asie où elle n’est finalement qu’une façon de ressembler à tout le monde. On s’est consolé d’avoir perdu son ombre, mais on sait bien qu’ici on vous demandera où elle est passée, et qu’on attendra de vous un peu de cette épaisseur sociale sans laquelle on est bon pour la fourrière.[…]
On craint les malentendus. On sait bien que les sédentaires vont vous prêter toutes sortes de vertus pittoresques et conquérantes alors que tassé dans un wagon à bestiaux ou assis sur son cheval crevé on n’aura pas même « vu Jérusalem ». (*)


(*) Nicolas Bouvier, L’échappée belle, p.113.