Jan 172009
 

La paix est une victoire virtuelle, muette, continue, des forces possibles contre les convoitises probables.
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Il n’y aurait de paix véritable que si tout le monde était satisfait. C’est dire qu’il n’y a pas souvent de paix véritable. Il n’y a que des paix réelles, qui ne sont comme les guerres que des expédients.
Les seuls traités qui compteraient sont ceux qui se concluraient entre les arrière pensées.
Tout ce qui est avouable est comme destitué de tout avenir.
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On se flatte d’imposer sa volonté à l’adversaire. Il arrive qu’on y parvienne. Mais ce peut être une néfaste volonté. Rien ne me paraît plus difficile que de déterminer les vrais intérêts d’une nation, qu’il ne faut pas confondre avec ses vœux. L’accomplissement de nos désirs ne nous éloigne pas toujours de notre perte.
Une guerre dont l’issue n’a été due qu’à l’inégalité sur le champ de bataille, et ne représente donc pas l’inégalité des puissances totales des adversaires, est une guerre suspendue.

Paul Valéry(*)


(*) Paul Valéry, Regards sur le monde actuel. Librairie Stcock, Delamain et Boutelleau, Paris, 1931, 216 pages. Disponible sur le précieux site « Les classiques des sciences sociales« , collection d de livres numérisés, dirigée et fondée par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie et développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l’Université du Québec à Chicoutimi.