Mar 272008
 
Toute méthode est une fiction, et bonne pour la démonstration.
Stéphane Mallarmé, Proses diverses, Notes.

Siwa, Source de la fiancee (c) Yves Traynard 2008Je suis à Siwa pour achever la rédaction de cet essai qui me tient à cœur qui s’intitule provisoirement « Pour un tourisme du réel ». J’ai une matière abondante, mais il me fallait un temps et un lieu pour la mettre en livre. A Siwa pour quelques semaines encore, je suis enfin à pied d’œuvre. Evidemment je me pose des questions de méthode. Ca toujours été ma marotte, la méthode. Comment se fabriquent les choses, dans quel ordre, selon quelles techniques et normes… Une vraie passion. J’ai même exercé durant quelques années le métier très sérieux de méthodologue. Je dictais toute la rigueur qu’on rêve de s’appliquer dans le travail, mais qu’on inflige plus facilement aux autres ! Je prescrivais la méthode comme un médecin les médicaments. Elle devait venir à bout de tout : des erreurs de conception, de fabrication, du gaspillage et de l’élasticité des budgets, des dérapages de planning et du stress. Hélas, la méthode n’a jamais rien soigné car elle n’a guère de vertu que préventive. C’est déjà pas mal me direz-vous sauf qu’à son contact certains en oubliaient même le plus élémentaire bon sens. Ils appliquaient à la lettre, bêtement. Les hommes surtout, qui retrouvent probablement là une rigueur militaire ou religieuse toute rassurante. Je me souviens de « revues qualité » qui ressemblaient à celles des paquetages et des armoires de caserne ; de certains manuels de procédure qui n’auraient pas dépareillé dans une abbaye bénédictine.

Comment se construit un essai, quel beau sujet pour un méthodologue honoraire ! Le recueil de la matière première, les secrets de fabrication, l’usage de l’introduction, du plan, de la rédaction, les conventions de présentation, de typographie, de style… Application méthodologique du jour : rôle dévolu a l’introduction dans un essai. Une mise en appétit, un décor planté, un cadre général un peu formel voire superflu, l’expression de quelques motivations avouables de l’auteur, un lien avec l’actualité, la description de la démarche ? Un peu de tout cela en n’oubliant pas qu’il faut pas tout dévoiler si l’on veut tenir le lecteur en haleine. Ce premier jet d’introduction fut un bon exercice de mise en jambe. Et même si à l’issue de la rédaction du corps de l’ouvrage j’y reviendrais très certainement, je tiens enfin un chapitre au complet. Rassurant non ?
Siwa, Source de la fiancee (c) Yves Traynard 2008Suprême récompense pour le travail accompli, premier bain dans les fameux bassins siwis, dont Hérodote révélait déjà les mystères. Eau douce, chaude, claire, légèrement pétillante sortie d’un désert brûlant. Le bain de la Fiancée, à l’orée de la palmeraie et à proximité de l’hôtel a été nettoyé en début de semaine. C’est sans doute dans ce large puits profond de quelques mètres que je me baignerais chaque jour, à l’heure chaude juste après le déjeuner qui se prend ici vers 14h. Avec Christiane, une jeune mamie française qui vit à Londres, nous enchaînons une balade à vélo. Mal nous prend. Une violente nuée de moustiques, énormes et sanguinaires, fond sur nous près d’une source du côté de l’île de Fatna. Dur de fuir par les chemins de terre avec les vélos de location que l’on trouve à Siwa. La concurrence impitoyable entre la dizaine de loueurs de la place a tellement tiré les prix vers le bas que leurs propriétaires sont incapables d’en assurer l’entretien. A 1€ la journée on comprend que les selles dévissent, les pneus soient lisses et usés jusqu’à la moelle, les freins aléatoires, les guidons flageolants et les garde boue un vieux souvenir. Le juste prix ça existe.