Mar 122008
 

L’exploitation du sous-sol des pays du Sud s’accompagne de la spoliation des terres, du mépris des hommes et de la nature. Ce n’est pas nouveau et s’il le fallait Tout l’or du monde le démontre avec une grande précision et sans simplification outrancière. Le film n’hésite pas à illustrer les nouvelles stratégies adaptées par les entreprises minières : indemnisation des paysans chassés, financement de projets humanitaires, nettoyage du site… Mais au-delà des injustices profondes que cette cosmétique à bien de la peine à masquer, ce film met le doigt sur la sècheresse de la pensée individuelle occidentale : absence de projet de vie, de société, de dimension cosmique… Les cadres blancs, pantins désarticulés d’une multinationale invisible, n’affichent pas le dixième d’exigence morale des paysans guinéens qu’ils réduisent à la mendicité.
Cette journée réservait d’autres critiques acerbes de l’Occident, sur le tourisme cette fois. Dans Cannibal Tours, la caméra change de point de vue. Et si les cannibales n’étaient pas ceux que l’on est venu voir mais nous les touristes avides d’images passéistes, de statuettes marchandées âprement, de corps exposés ? Le vieux chef de village s’interroge. On ne les comprend pas ces touristes. Que cherchent-ils dans la maison de nos ancêtres ? Ils lisent des livres sur nous et après ils viennent pour voir ; ils sont riches et ne nous achètent rien ; on fait payer la visite, les photos, vous savez, on les reçoit parce qu’on a besoin d’argent. L’indécence se logerait-elle dans la permanence de ce malentendu de sens ? Les touristes eux sont ravis de leur aventure. Ils étaient venus pour connaître le mode de vie des ces Papous et repartent quelques heures plus tard plein de certitudes. « Ils sont satisfaits comme ça, de leur vie lente et paisible » assurent-ils niaisement grimés en bons sauvages. Pas à une contradiction près, une touriste après avoir fait le plein de pièces d’objets rares, peste contre la marchandisation de l’art. Petits forfaits vite oubliés ; l’année prochaine ce sera l’Amazonie, l’Inde, ou l’Égypte… Unsere Afrikareise, images d’un film de commande sur un safari jamais montées, est un violent réquisitoire contre le tourisme cynégétique, hécatombe où se consomment animaux et images de l’autre.
Dans un tout autre style, particulièrement original, London est une fantastique balade dans la capitale britannique, où chaque site visité renvoie à une situation sociale ou politique de l’Angleterre tatchérienne bien loin du cliché qu’il est censé évoquer.

Avec Playtime, Tati nous a laissé une peinture extraordinairement drôle et bien vue d’une France des années 60 en route vers une modernité. De Paris, que les touristes américaines sont venues découvrir, nous ne verrons que des immeubles en verre, bureaux labyrinthiques et absurdes, rond-points carrousels ! La tour Eiffel ou le Sacré-cœur apparaissent parfois en reflet dans une porte vitrée. Seul vestige d’un Paris à la Doisneau : un kiosque et sa fleuriste qu’une touriste américaine aimerait tant immortaliser (« it’s so Paris ») mais dont des Parisiens trop modernes viennent polluer le champ photographique.


Sélection française
Tout l’or du monde Nugent, Robert
T7 L’ethnologue et les touristes 1
Children Playing in the Rain Asch, Tim
Cannibal Tours O’Rourke, Dennis
T10 Critique de l’image touristique, vues critiques 1
Cross Worlds Fontaine, Cécile
Unsere Afrikareise Kubelka, Peter
Afrika Bonus Draschan, Thomas
London Keiller, Patrick
Sélection française
En France Serero, Benjamin
Tourisme
Playtime Tati, Jacques