Juil 212006
 

Il est un point commun à la population blanche expatriée au Mozambique : l’incroyable négligence dans la chevelure. Si je me permets volontiers cette remarque – qui vaut tant pour les hommes que pour les femmes – c’est que j’y participe ! Circonstance atténuante : il est bien difficile de trouver coiffeur à sa tête ici dès lors que l’on veut préserver plus de 3mm de crin sur le caillou. Je me faisais cette remarque en dénombrant les spectateurs venus assister au concert de Nanando au CCFM(*). Je déplorais la faible participation des Mozambicains à un tel événement. Les cinq euros réclamés à l’entrée doivent y être pour quelques chose. A voir la place de l’Indépendance voisine transformée en concessionnaire Toyota j’avais l’impression que le concert était réservé aux seuls détenteurs de 4*4 !
Dommage car le concert était très réussi. Nanando, jeune mozambicain et guitariste virtuose, marie très bien marrabenta, jazz et funk. Moins convaincant au chant (même pas du tout), il était fort heureusement accompagné à deux reprises d’une jeune chorale de filles en somptueux capulanas émeraude et de gars façon Negro spiritual, veste noir et chemise blanche à large col. Nanando était accompagné de deux claviers, d’un bassiste d’un batteur et d’un excellent joueur de tambours du groupe Kapa Dech et créateur d’une variété de sons extraordinaires. Le marrembeta est une musique populaire de Maputo. Elle fait une place de choix à la guitare égrenée en notes si aiguës qu’on pourrait amputer son manche de 10 barrettes sans dommage pour la musique !
A près de 23 h, rare spectateur non motorisé il ne me restait qu’à raser les murs pour regagner la Mondlane dans une ville discrètement en goguette. Doublé un bordel, croisé quelques filles qui font leur affaire cette veille de week-end. Une ambiance qui rappelle les affres de cette missionnaire évangélique romande à Maputo en… 1887. « A Lourenço Marques et dans les environs, la corruption, l’ivrognerie et les péchés de toutes espèces vous font penser à Sodome. Or, fonder une station quelque part, c’est y attirer les chrétiens qui, petit à petit, viendront tout naturellement s’établir autour de leur missionnaire. Or, est-il prudent d’attirer de nouveaux convertis dans un endroit où les tentations abondent à un point inouï ? N’est-ce pas les exposer à retomber dans le mal avant qu’ils soient bien affermis ?» (**)


(*) Nanando : ne cherchez pas de disque solo il n’y en a pas, même ici.
(**) Du Transvaal à Lourenço Marques, Lettres de Mme Ruth Berthoud-Junod de la mission romande, publiées en 1904. pp.161. Disponible sur le site de la BNF. Témoignage extraordinaire de courage et de ténacité pour tenter de convertir les Africains au protestantisme dans cette très catholique colonie portugaise. Le texte vaut autant pour la description des conversions teintées de syncrétisme que parce qu’il représente un rare témoignage sur la population noire de l’époque.