Juil 092006
 

A la Livraria Escolar Editoria, non loin du café Surf, j’ai acquis hier un recueil de chroniques de Mia Couto intitulé « Pensatempos, textos de opinião » (*) dont j’ai de la peine à me détacher tant il est passionnant. Ce recueil de 18 interventions, conférences, articles de Savana et même du Monde diplomatique du plus célèbre des auteurs mozambicains se boit comme un carioca de limão. Son humour noir de café est aussi acide que le zeste de citron vert qui relève la boisson nationale. Il est fait de la même langue alerte que ses romans. Ma chronique préférée est sans doute son Pobres dos nossos ricos (Pauvres gens que nos riches) où il s’en prend à la classe de petits parvenus du pays. Extraits.
« Le plus grand malheur d’une nation pauvre est que, au lieu de produire de la richesse elle produit des riches. Mais des riches sans richesse. En réalité, il serait préférable de les appeler non pas des riches mais des « argentés ». Le riche est celui qui possède les moyens de production. Le riche est celui qui gère l’argent et crée de l’emploi. Un « argenté » est celui qui a simplement de l’argent ou qui pense qu’il en a. Parce qu’en réalité l’argent est à qui l’a […] Nos argentés-express ne se sentent pas bien dans leur peau. Ils rêvent d’être Américains, Sud-africains. Ils aspirent à être autres, éloignés de leur origine, de leur condition. »
Dans la même veine la Receita para um jet-set nacional vient illustrer le précédent pamphlet. « Au Mozambique il n’est pas nécessaire d’être riche. L’essentiel c’est de paraître riche. » Suit une énumération de codes de conduite pour être un vrai jet-setista. A la lettre C entre Cerveja (« Les bouteilles sont jetées au milieu de la rue. La bonne éducation c’est pour les pauvres ; les bonnes manières pour celui qui travaille ») et Cultura (« un jet-setista ne lit jamais et ne va jamais au théâtre » on trouve Chapéu. « Le chapeau est fondamental. Mais un vrai jet-setista ne porte pas le chapeau quand les autres l’utilisent c’est à dire au soleil. Le chapeau il le porte à l’ombre, à l’intérieur des voitures, et sous le toit des maisons. »
Patiemment, Mia Couto dénonce les dérives nées du virage radical du pays vers le libéralisme.


(*) Traduction par mes soins donc sans doute approximative. « Pensatempos, textos de opinião », Mia Couto, Editions Nadjira. 2005. 250 Mtn soit 8 euros. L’édition n’est pas bon marché au Mozambique !